dimanche, juillet 10, 2011

La Boillat, le grand départ (Karl, le retour)

Merci!

Après tout ce temps... Après tout ce temps, je n'avais pas tourné la page. Comme pour vous, elle ne sera jamais vraiment tournée. On n'oublie pas. J'avais juste d'autres occupations. Fini les études, bonjour le travail! Mais après tout ce temps, il n'est pas un jour sans que je pense à la Boillat, comme vous sans doute. Y penser, ce n'est pas seulement triste. Tant de personnes courageuses se sont battues pour elle que je suis heureux de les avoir côtoyées. Même dans très longtemps, ce sera encore ma plus grande fierté.

Ce billet commence donc par un immense "merci". Merci pour la leçon de dignité, pour celle de courage, pour celle de loyauté, pour celle d'amitié. Si j'écris aujourd'hui, c'est parce qu'on me l'a gentiment demandé. Je pensais que Karl dormait dans l'oubli. Mais vous ne l'avez pas oublié. On n'oublie pas. Ca me touche.


Plongée dans les poubelles

Il faudrait en rester là. Dire merci. Ce serait bien. Mais ces jours, l'odeur de vomi de la poubelle swissmetalienne remonte à nos narines. C'est dans ce vent de puanteur que Karl revient pour un tour de piste, pour prêter sa petite voix à ses amis de la Boillat.

Il y a quelques temps, Martin Hellweg, avait quitté le navire. Ou plutôt, il avait quitté ce qu'il avait fait de Swissmetal, un rafiot pourri. A cette époque, il expliquait que sa mission de restructuration était terminée, que le patient sortait des soins intensifs. Filant la métaphore, Martinou ajoutait que régler les derniers détails relevait de la "chirurgie esthétique". On a surtout vu que le patient s'était fait voler les reins et le foie au passage, si Martinou veut bien me passer l'expression. C'est au pied du mur qu'on reconnaît le maçon, est c'est aux dizaines de millions perdus qu'on reconnaît le crétin format galactique restructurateur d'entreprise.



Aujourd'hui, Martinou est moins tout feu tout flamme. De retour chez Swissmetal, avec la casquette de l'indéboulonnable idiot en chef président du conseil d'administration, il succède à des personnalités aussi irremplaçables que Friedrich Sauerländer et François Carrard. Ce poste difficile, payé à coup de misérables dizaines de milliers de francs pour quelques heures passées à regarder la boîte s'enfoncer dans la stratéchie... Ce poste méritait le retour de l'homme providentiel. Nouvellement élu, Martinou explique donc doucereusement que les managements précédents ont été "trop optimistes". "Abyssalement stupides" serait plus adapté, mais Martinou n'a sans doute pas voulu choquer ses prédécesseurs, c'est-à-dire lui-même.

Vu la capacité actuelle de Swissmetal à perdre de l'argent, Laxey, actionnaire principal, est pressé de voir le bout du tunnel. En effet, le groupe est acculé à la faillite et les chances d'éviter cette issue funeste sont faibles. D'autant plus faibles que Laxey ne veut surtout pas l'éviter et a déjà refusé une offre. Laxey possède 32,9% des 6'624'106 de Swissmetal, achetées à environ 40 millions de francs le tout (dans les 18 francs par action, c'est une estimation). Le but? Presser le citron, liquider les actifs dormants, faire monter le cours boursier, et revendre les actions avant que le montage se casse la pipe. Ca n'a pas fonctionné. Laxey est resté chez Swissmetal pour tenter de ne pas perdre sa mise. Aujourd'hui, avec une action qu'on peut regarder tomber à 2 francs, Laxey a perdu dans les 35 millions de francs. C'est ce qui arrive quand on n'écoute pas ceux qui ont raison, les grévistes de 2006.

Laxey est maintenant face à un choix: essayer de remonter l'entreprise pour récupérer l'argent perdu en s'y attelant des décennies ou... La laisser couler, se présenter au portillon comme créancier et se payer en vendant ce qui peut l'être, par exemple les terrains de Dornach. Laxey veut donc la faillite. De ce fait, on reprend Martinou dans la bouche d'égout où on l'avait balancé parce qu'avec quelqu'un comme lui, Laxey a une certitude absolue: Swissmetal ne pourra pas éviter la faillite. Mettez Martin Hellweg aux commandes d'une entreprise, elle crèvera aussi sûrement que si on l'avait bombardée au napalm. C'est une certitude démontrable par la lecture de diverses feuilles officielles. Sans compter que Martinou a ramené toute sa brochette d'experts patentés pour le grand final: Ally Management, dont rien moins que Patrick Huber-Flotho, nouveau CEO de Swissmetal, cet homme qui ne sert à rien, mais qui est collé comme un chewing gum sous les pompes de Martinou.

Vu l'éminente asssemblée qui souhaite désormais lier son destin au naufrage de Swissmetal, Karl se demande si Ally Management n'est pas un peu à cours de mandats. Ou si Laxey n'a pas voulu tous les aligner sur le pont histoire de les exhiber un peu tout en les chargeant du sale boulot. Nous verrons.


Souvenirs stratégiques

Par les effets d'une grande modestie, depuis son retour Martinou parle peu de sa glorieuse biographie dans les journaux. Il serait pourtant dommage de ne pas redire les grandes lignes de son oeuvre.

Martin Hellweg fut avant tout l'homme d'une stratégie destinée à sortir Swissmetal de l'ornière. Quand il arriva aux commandes du groupe, ce dernier était en effet victime depuis longtemps d'un management plus apte à gober des petits-fours en parlant jeux olympiques qu'à gérer des usines. Ca allait changer. Avec Martinou, on allait parler Cologne et carnaval, parce que l'homme est un gai luron. On allait aussi parler stratégie, c'est clair, parce qu'il faut bien avoir l'air un peu sérieux de temps en temps.

Ainsi, Martinou commença par renforcer l'usine de Dornach, dont l'histoire était une suite ascendante de déficits. Pour ce faire, il décida de licencier le directeur de la Boillat. Ensuite, après avoir négocié une sortie de grève avec les naïfs politiciens du canton de Berne, il annonça que la fonderie de la Boillat allait fermer boutique. Les alliages à haute valeur ajoutée seraient fondus à Dornach, dans une fonderie vétuste. Ca n'a jamais fonctionné.

Martinou, dans sa générosité, voulut aussi acheter une nouvelle presse pour l'usine de Dornach. Les mauvais esprits lui assuraient que cette presse ne marcherait jamais mais, voyez-vous, si l'on écoute les mauvais esprits, on n'avance pas! Ainsi fut-il. La nouvelle presse, surnommé "le monstre" dans le rapport annuel 2009 et le "mouton à cinq pattes" partout ailleurs, ne fonctionna jamais. Mais ce n'est pas tout! Une erreur comme ça, d'autres peuvent la faire. Mais une comme celle qui suit, seul Martinou peut y arriver, parce que lui, il n'est pas comme nous. Convaincu d'avoir réussi son coup, Martinou fit démanteler les presses de la Boillat avant même que la nouvelle presse soit opérationnelle. Ainsi, on ne pourrait plus faire marche arrière. Et en effet, maintenant que des millions ont été engloutis dans ce projet... Eh bien on ne peut plus faire marche arrière.

La Boillat produisait des pointes de stylo. Même si c'était rentable, ce n'était pas assez high tech pour Martin Hellweg, qui voulait produire des tubes pour train d'atterrissage selon un procédé révolutionnaire, à Dornach. Jean-Pierre Tardent porta ce projet à bout de bras durant des années. Apparemment, ses bras cassèrent sous la charge, et jamais un de ces fameux tubes ne fut vendu. Qu'advint-il des pointes de stylo? Après la grève de 2006, les machines destinées à les produire à Reconvilier furent démontées et envoyée chez Busch-Jaeger à Lüdenscheid. Mais si on peut transporter les machines, on ne peut pas envoyer le savoir-faire dans la caisse d'à côté. Là non plus, ça ne fonctionna jamais.

Comment a-t-on fait pour financer ces tentatives magistrales? Swissmetal possédait une quantité faramineuse d'actifs dormants sous la forme de stocks de métaux. Ces stocks ont été vendus à un moment où les prix des matières première flambaient. Un joli coup spéculatif n'est-ce pas? Eh non. Aujourd'hui, les prix flambent à nouveau. Swissmetal n'a plus de stock important, plus les moyens d'acheter des matières premières, et ce qui reste est mis sous clé par les banques.

Dès 2006, Martinou décida d'une expansion mondiale de Swissmetal. La stratégie visait "l'excellence opérationnelle" (cf. ci-dessus, chapeau bas l'artiste) et "l'expansion asiatique". Il visita donc la Chine avant de jeter son dévolu sur l'Inde. En 2008, Swissmetal ouvrit donc une usine dans ce pays, probablement au fond d'un garage entre deux vélos. Dans le rapport annuel 2009, on apprend que cette usine "n'est plus une priorité". Elle n'a jamais rien produit.

Sur cette pièce montée de bêtise, il y a évidemment une cerise. Une sorte de quintessence de la stupidité, d'idée tellement aberrante qu'on n'y penserait pas, même essayant d'être imaginatif. Ce fut la Calotile, renommée Atmova suite aux ennuis causés par un petit plaisantin (Karl en rit encore). Qu'est-ce donc? Une tuile chauffante. Elle est creuse, de l'eau froide arrive dedans et en ressort chauffée par le soleil. Coup de génie, cette tuile est en... cuivre. Le cuivre, oui, ce métal qui sert à construire à peu près tout ce qui doit conduire de l'électricité et tout un tas d'alliages irremplaçables. Le cuivre, ce métal horriblement cher. Mais enfin, pourquoi bêtement faire des tuiles en argile, cette matière si facile à trouver, plutôt qu'avec du cuivre qu'on ne peut pas se payer? Dans le rapport de 2010, on apprend que la fameuse Atmova a engendré un déficit de 11,7 millions de francs. Pour une tuile, c'était une tuile. Une grosse.

Martin Hellweg, qui a donc fait perdre au moins 50 millions de francs à son entreprise au lieu de les lui faire gagner, le revoilà. C'est tellement incroyable que Karl ne parvient pas à s'en révolter. "Consterné", voilà le mot.


Oui, mais alors?

A l'heure qu'il est, Swissmetal est presque mort. Hormis le fait que c'est triste pour les ouvrier de Dornach, on s'en fiche. A l'heure qu'il est, la Boillat est presque morte. On s'en fiche bien moins. Les machines ont en bonne partie été déplacées ou détruites, et ce qui reste sera probablement vendu au retour des vacances. En rentrant, les employés auront leur lettre de licenciement chez eux, à n'en pas douter. Le savoir-faire, quand à lui, a disparu depuis un bout de temps. La Boillat, c'est un cadavre que les hyènes s'apprêtent à dévorer.

S'il faut repartir pour une nouvelle Boillat, c'est donc presque de zéro. Des projets dorment dans des tiroirs, des rêves traversent les esprits. Pour une nouvelle Boillat, certains seraient même prêts à un peu de bénévolat. Il y aurait un marché pour des produits estampillés "Boillat". Mais qui se lancerait à coups de dizaines de millions? Espérons... Sait-on jamais.


The end?

La fin de la Boillat, c'est aussi celle de Karl. Ce billet est probablement le dernier, mais il sera correctement suivi, avec la publication des commentaires, etc. En hommage à quelques commentateurs du blog, j'avais envie d'écrire "Pan, Karl est mort!". Mais un personnage inventé peut-il vraiment mourir?

Quoi qu'il en soit, je vous remercie.

dimanche, janvier 25, 2009

3 ans...

Que de temps!

Le temps passe vite, mais il n'emporte pas les souvenirs. Pas tous du moins, pas ceux qui comptent. Il y a 3 ans a commencé la seconde grève des Boillat et, de mon côté, j'ai commencé mon blog. C'était fou, de voir tout ce monde s'enflammer pour une usine, pour une belle façon de faire son travail, pour la dignité. Les journalistes, les politiciens, la population, les milieux économiques, tout le monde était impliqué.

Et maintenant? Que reste-t-il, sinon une usine devenue coquille vide, où quelques personnes travaillent encore, se demandant quand viendra la fin? Une Boillat reléguée à son triste sort, mutilée à mort, que tous les efforts du monde n'auront pas réussi à sauver.

Il reste donc les souvenirs, qui reviennent encore et encore. Alors, souvenons-nous!


Il fallait oser

Pour faire la première grève, sans préavis, en réaction au licenciement d'André Villemin, il fallait avoir du courage. Mais pour la seconde, se relancer dans un tel conflit, parce qu'aucune solution n'avait été trouvée, il fallait plus que du courage: il fallait une conviction, celle d'avoir raison, celle de pouvoir vaincre la bêtise par la révolte. C'était donc le 26 janvier 2006 que les machines se sont tues de nouveau. La Boillat plongeait dans l'inconnu parce que cette fois, on ne se contenterait pas d'un protocole en forme de promesse non tenue. La région, et même au-delà, s'était mobilisée pour la première grève et, après quelques mois de sales nouvelles venant de la direction de Swissmetal, elle était prête à recommencer, plus fort. Toutes les forces qu'on pouvait espérer convergeaient vers Reconvilier, pour soutenir les grévistes.

Ca n'a pas suffit. On a envie de se demander: qu'avons-nous fait faux? Qu'aurions-nous pu faire de plus? La réponse à ces deux questions est, je crois, "Rien". Les Boillat, et ceux qui les ont soutenus, ont fait tout ce qu'ils pouvaient, et même un peu plus. Rien que sur internet, les heures de travail des quelques personnes qui ont oeuvré se chiffrent en... milliers, comme le nombre des manifestants qui sont venus soutenir cette cause.

Et pourtant, ce ne fut pas assez. La bêtise, quand elle est aussi profondément implantée dans l'esprit d'un chef d'entreprise, semble décidément incurable. Nous sommes dans un pays libéral et qui, par là, laisse une grande latitude à ceux qui prennent des responsabilités patronales. Ce libéralisme sous-entend un certain fair play: "On ne vous impose pas beaucoup de règles, mais on attend de vous un certain sens des responsabilités", semble dire l'Etat aux patrons. D'un Hellweg, c'est le genre de choses qu'on ne peut pas attendre, pas plus qu'on ne peut en attendre de l'humilité, de l'intelligence ou même un peu de jugeotte.

Mais la suite a montré que Martinou, le Maîîître de Swissmetal, n'était pas seul. La naïveté avec laquelle Marcel Ospel, le fier directeur surpayé au -hem- mérite, a enfoncé UBS dans les subprime est l'exemple le plus cinglant. Et aujourd'hui, on apprend que, contre tout bon sens, des banques ont investi à tour de bras dans les fonds Madoff, du nom d'un escroc, que son propre fils à dû dénoncer à la justice. Toutefois, il reste une différence entre ces gens et Martin Hellweg. Ospel comme Madoff se sont montrés capables de construire des choses et d'avoir des idées, même si, finalement, trop gorgés d'orgueil, ils ont perdu la réalité de vue, pour ne pas dire qu'ils ont carrément déjanté. L'histoire de Martin Hellweg, par contre, est intégralement celle d'une sangsue dont la seule compétence est de se vendre elle-même. Tout ce qu'il a fait, c'est de couler des entreprises, puis d'affirmer qu'il les avait en réalité sauvées de pire encore.

Martinou a voyagé longtemps avant de tomber sur un os. Et cet os, ce fut les Boillat. Eux connaissaient assez leur usine pour savoir ce qui était bon pour elle, et pour savoir que Martin Hellweg et la clique qui l'y entourait étaient néfastes. Le silence suivait toujours les lamentables destructions opérées par Hellweg, mais la Boillat a fait du bruit. Puisse ce bruit être entendu par d'éventuels mandataires d'Ally management, l'entreprise de restructuration dont émane le CEO de Swissmetal.

Les Boillat avaient raison et, maintenant que la crise économique frappe, ça crève les yeux. Swissmetal perd de l'argent et annonce que tout va bien pour masquer la chute du cours de son action. Actuellement, une action de Swissmetal vaut 7 francs 80, soit moins que sa valeur d'émission: la chute, énorme, n'est pas seulement due à la crise. Sachant que Swissmetal a émis en tout 6'624'106 actions, le groupe entier vaut, pour ses actionnaires, un peu moins de 52 millions de francs. Souvenons-nous maintenant d'un chiffre qui avait circulé: des acheteurs étaient prêts à payer 60 millions de francs pour la Boillat seule! Quels sont les inconscients qui pouvaient refuser une telle offre, puis ensuite détruire tout l'efficacité de Swissmetal? Martinou et son fidèle Fridou!

Cet argent, qu'ils n'ont pas voulu, ne les a pas empêchés de détruire la Boillat qu'ils disaient si précieuse. La bêtise a culminé avec la destruction des deux presses. L'être humain moyen, bête comme il est, imagine que lorsqu'on met en route une machine aussi complexe que la nouvelle presse de Dornach, on prend la précaution de conserver les vieilles presse au cas où. La direction de Swissmetal avait tellement tout planifié que, pour elle, ces précautions ne servaient à rien: leur génie ne pouvait pas faillir.


Faillite intellectuelle chez Martinou et ses sbires

Et pourtant, Martinou, dans son infinie humilité, concéda tout de même quelques soucis, commençant son rapport de novembre 2008 ainsi :
"Les problèmes que nous rencontrons depuis le début de l'année pour démarrer notre nouvelle presse à extrusion paraissent bien insignifiants face à l'actuelle crise financière mondiale".
La manière de minimiser est tellement grosse que c'est presque un gag. Du Martinou tout craché, lui qui explique toujours aux gens qui le contestent: "Vu depuis la lune, le problème que vous avez est insignifiant". Vu depuis la lune, en fait, la seule chose qui soit signifiante pour Martinou, c'est son égo. Et cette presse insignifiante, qui est tout de même l'élément central de la chaîne de production de Swissmetal, ne marche pas. Et les machines qui pourraient assurer la production en attendant qu'elle fonctionne (si c'est possible...), la direction de Swissmetal a décidé de les détruire.

Contre ça, Les Boillat et ceux qui les soutiennent ont tout fait, et même un peu plus. Mais face à un tel monument de stupidité, quelle solution pouvait-il y avoir? Toutefois, nous avions raison, et le temps qui passe nous le montre chaque jour. Swissmetal, entreprise sinistre, est devenue entreprise sinistrée. Au point même que, à la direction de Swissmetal, on s'en rend compte... C'est dire! Yvonne Simonis, qui garantissait par sa signature des bilans et des analyses qui sentent bien mauvais, a quitté le navire. Apparemment, elle n'aimait pas assez vivre dans le risque.

Depuis le début de l'année, Swissmetal publie bonne nouvelle sur bonne nouvelle. La Stratéchie n'a pas changé: plus ça va mal, plus Swissmetal annonce les merveilles à venir. Donc, ça va très mal. Le 9 janvier, nous découvrions que la Calotile, devenue Solartile suite à quelques soucis d'image, est finalement nommée l'ATMOVA. Un véritable cours de poésie! Il y a bien sûr plein de projets concrets et, comme on sait, le citoyen adore dépenser plus d'argent pour l'écologie quand c'est la crise. Bref, ça va marcher du tonnerre (tiens, surtout en cas d'orage si ça conduit l'électricité!).

Le serpent de mer des tubes pour trains d'atterrissage a refait surface le 16 janvier. Grande nouvelle, après des années de processus de certification, Messier-Dowty, leader dans le domaine, a accepté les produit en CN8. Un jour, peut-être, une commande suivra-t-elle... Et là, il faudra voir si Swissmetal peut encore produire le CN8. Ce n'est pas important, puisque, selon le communiqué, "D’autres finalisations de processus de qualifications sont attendues pour les prochains mois". Pour quels produits? Pour quels clients? Quand? Normalement, si un communiqué ne répond pas à ce genre de questions, c'est que les réponses n'existent pas, que c'est du vent.

Et enfin, le 23 janvier, nous apprenions que le "marché de la demande" est "hétéroclite"... Ca pourrait vouloir dire que Swissmetal a encore plusieurs clients différents! Ca pourrait aussi vouloir dire que le flux de commande est assez... fluctuant! Là encore, Karl reste admiratif devant ces élans de poésie swissmétalienne. Le mieux est l'ennemi du bien, sauf en la matière, raison pour laquelle voici une seconde portion:
"Le marché de la demande a très bien commencé depuis le début de l’année pour Swissmetal mais il reste très instable. Au niveau des différents segments du marché il affiche des résultats hétérogènes. Concernant les trois derniers mois, nous remarquons une situation fortement à la baisse. D’un point de vue actuel, les sites de production de Swissmetal n’ont pas besoin de procéder à des licenciements. Swissmetal adapte les besoins en capacité en procédant à des mesures de chômage partiel déjà initiées ponctuellement sur les sites de Lüdenscheid et Reconvilier. Dans les services centraux, à savoir hors production, sur les 134 postes à temps plein, environ 35 seront supprimés afin de préserver l’entreprise des conséquences d’une éventuelle poursuite ou d’un durcissement de la crise économique".
Ca tourne autour du pot, on le sent, mais que c'est beau! "Le marché de la demande" qui "affiche des résultats hétérogènes". La langue est poussée dans ses dernières limites, ici. Surtout quand on apprend que "d'un point de vue actuel", il n'y a pas besoin de licencier mais que, par souci de prévoyance, Swissmetal va licencier 35 personnes quand même, hors production (donc plutôt des petits chefs à Dornach). Le seul à profiter de l'allègement hiérarchique, ce sera Jean-Pierre Tardent, qui a su se faufiler une nouvelle fois pour décrocher le poste de directeur "Recherche & Développement, Marketing Technique et Gestion Qualité", rien que ça.


Mais encore?

On peut tourner le problème comme on veut, mais Swissmetal, et la Boillat avec, est bientôt au bout du chemin. Pour Swissmetal, ce sera avec joie. La peine de voir leur incompétence leur exploser à la face n'est rien comparé à ce que Martinou, et Fridou et leur seconds mériteraient, mais au moins ils sauront que dans cette histoire, les idiots n'étaient pas ceux qu'ils croyaient. Karl espère que, dans l'actionnariat, quelqu'un aura envie de se rembourser en les attaquant en justice. Pour la Boillat, ce sera avec tristesse. Les produits Boillat n'ont pas été remplacés, et il y aurait toujours une place pour une fonderie qui produit de la vraie qualité. Mais comment une fonderie sans presse pourrait-elle y arriver?

La vie réserve parfois des surprises et l'une d'entre elles, une extraordinaire, fête ses 3 ans aujourd'hui. Bonne fête à vous, les grévistes!

dimanche, novembre 16, 2008

"Oui Karl, il serait temps...

... Que tu reprennes du service..."

C'était une remarque, dans un commentaire anonyme, voilà quelques jours. Et il faut bien avouer que l'auteur a raison depuis des mois! Mais, comme il se passait bien peu de choses du côté de Swissmetal, Karl sommeillait.

1955, l'époque où l'on faisait
un livre pour fêter la Boillat
.

Toutefois, les choses s'accélèrent à nouveau et, comme dans une longue maladie, Swissmetal semble prise d'une poussée de fièvre, probablement mortelle. Mais de quelle maladie parle-t-on? De la bêtise. Non, plutôt de la Bêtise avec un grand B. Cette bêtise qui rend la direction de Swissmetal insurpassable dans au moins un domaine. Ce produit invendable, dont Swissmetal est devenu l'un des leader en l'espace de quelques années.

Aujourd'hui, nous fêtons les 4 ans de la première grève de la Boillat. Le 16.11.2004, suite au licenciement du directeur André Willemin, démarrait une grève spontanée. Une étincelle venait de faire exploser un tonneau de poudre.

Aujourd'hui, c'est donc l'anniversaire de la plus belle leçon de courage qu'on puisse rêver!

2004, on publie un livre pour
raconter la grève de la Boillat:
autres temps, autre direction.


A suivre...

jeudi, avril 03, 2008

C'est long...

Contrairement à la grève de Bellinzone, cet "édito" joue les prolongations. Mieux vaut cela que l'inverse :) Les modifications se trouvent à la fin. Merci!


Avant d'expliquer le pourquoi de ce titre, Karl doit faire une petite parenthèse dont il s'excuse. Il la place au début à contre-coeur, pour que ceux qui passeraient sur ce blog pour la première fois ne la ratent pas.


Démenti

En effet, il faut bien peu connaître les lieux pour propager la rumeur selon laquelle Fred Charpié, qui se porte candidat à la présidence du Parti socialiste du Jura bernois, serait Karl. Cette rumeur est fausse et je la démens ici, comme je l'ai démentie dans les pages du Journal du Jura.

J'ai créé le personnage de Karl pour la Boillat et seulement pour elle. Dès le départ, j'ai assuré à chacun que la notoriété de Karl ne serait jamais employée autrement que pour soutenir le juste combat des Boillat et pour faire vivre son héritage. Ainsi, il n'a jamais été question de devenir membre d'aucun parti politique, quelles que soient les idées qu'il défend et le respect qu'il mérite.

Dès lors, les intéressés sont priés de prendre note du fait que Karl est à jamais un personnage collectif, issu de mains anonymes. Merci.


C'est long...

Quand une des Femmes en colère, en entrant à l'usine CFF Cargo de Bellinzone, a demandé au gréviste qui gardait l'entrée si ça allait, il a répondu "C'est long...". Comme quoi, une grève peut être résumée en deux mots. Les travailleurs attendent, ne savent pas de quoi sera fait leur avenir et espèrent une simple chose: travailler de nouveau. Ils attendent que là-haut, du côté de la direction, on veuille bien se décider.


C'est parce que la grève de Reconvilier et celle de Bellinzone ont bien des points communs que les Femmes en colère ont magnifiquement organisé une soupe aux pois. Environ 1500 francs y ont été encaissés (merci à ceux qui sont venus!) et l'idée a germé d'apporter directement cette collecte, le dimanche, aux grévistes de Bellinzone. A Bellinzone, tout a donc commencé par un "C'est long...", qui marquait le début d'un accueil extraordinaire. Pour tout en dire, il suffit de savoir que la somme a été remise devant les 8'000 manifestants, à la demande des grévistes, qui ont en haute estime ce qu'on fait les Boillat.


Mais que se passe-t-il, alors, à Bellinzone? Une grève dont les grévistes disent qu'ils n'auraient peut-être pas osé la mener si, à la Boillat, on n'avait pas osé. Une grève parce qu'ils font face à une direction qui les a traités comme des moins que rien. Jusqu'à dernièrement, les CFF investissaient à Bellinzone des dizaines de millions. Les 8 millions qu'ont coûtés la dernière machine n'ont pas été utiles: elle n'était pas encore en service que la direction annonçait la fermeture de l'usine. L'usine -les officine, ou ateliers-, d'ailleurs, est en très bon état: les bâtiments sont souvent neufs, ou rénovés récemment, les ateliers sont entretenus avec soin: tout laissait imaginer que CFF Cargo Bellinzone avait un avenir superbe devant elle! Un peu comme la Boillat, non?

Mais voilà, un changement de directeur, une nouvelle stratéchie de la table rase, et Bellinzone, du jour au lendemain, d'après des chiffres introuvables, était un poids mort. Rien que pour le mépris contenu dans un tel changement de cap, une grève se justifie.


On peut bien envisager que si tout avait été centralisé à Bâle, ou ailleurs, dès le départ, CFF Cargo se porterait mieux. Mais là, maintenant qu'il faut démanteler et déplacer, quel coût pour le savoir-faire perdu? Quel coût pour le transport et le redémarrage des machines? Personne ne sait, mis à part une certaine direction. Comme le remarque Ron Hochuli dans Le Temps du 3 avril:
"Au-delà des mesures d'assainissement si controversées, la stratégie pour ramener CFF Cargo sur les bons rails paraît encore très nébuleuse. Les responsables n'ont toujours pas dévoilé de chiffres détaillés sur les différents pans d'activités. Pour l'heure, ils n'ont divulgué que des idées très sommaires".
Bel euphémisme! Au fond, une direction, qui n'a jamais visité le site de Bellinzone, décrète qu'il faut repartir de zéro, comme si ce nouveau départ allait apporter des miracles et être gratuit. Une proposition, pour calmer les grévistes, vient alors à point nommé: 60 emplois seront conservés à Bellinzone. 60 emplois, sur plus de 400, dont 70 (!) apprentis. Que fera-t-on, avec 60 employés? De la peinture? De la menuiserie? Un peu de mécanique? Amènera-t-on les locomotives pour les démonter, en réparer la partie électrique, puis les remonter et aller les démonter de nouveau à quelques centaines de kilomètres? Comme la Boillat, les officine sont un tout, et supprimer des parties de ce tout rend l'ensemble inefficace.


Aussi loin que Karl puisse voir, ce qui se passe au Tessin est approximativement aussi aberrant que ce qui s'est passé à Reconvilier. De ce fait, Karl souhaite de tout coeur que les grévistes de Bellinzone remportent leur combat et invite chacun à témoigner sa solidarité. Le geste le plus simple consiste à signer l'appel en ligne à ce lien ou à l'imprimer via ce lien, puis à l'envoyer aux grévistes. Oui, c'est sur le site d'Unia, mais soyez sûrs que le comité directeur du syndicat n'est pas plus en odeur de sainteté au Tessin que dans le Jura bernois! Quelqu'un, Michela, a aussi créé un blog sur cette grève, que voici: www.rivoltatraledita.splinder.com. Pour l'ambiance, il faut allumer ses haut-parleur!


Pourquoi?

Pourquoi Karl, au-delà d'une solidarité de coeur et de points communs, parlerait-il de cette grève tessinoise? Une expression revient souvent, celle de "région périphérique". Le Jura bernois, comme on a pu le constater de toutes les manières, a un poids politique proche de zéro (il suffit de songer à la N16). Il en va de même pour le Tessin. Même, le sentiment d'être abandonné par l'Etat y est encore bien plus fort, pour différentes raisons. Ce qui fait la force d'un Etat, ce n'est pas seulement l'efficacité économique, mais le fait que les citoyens y croient, qu'ils se sentent protégés et valorisés. Au moment de fermer les officine, il serait bon d'y repenser.

Mais surtout, il semble que du côté des dirigeants, on se moque de plus en plus de la paix du travail. La paix du travail, ce n'est pas que les CCT. C'est un combat, entre syndicats et patronat, qui se déroule avec un minimum de respect. La paix du travail sous-entend, je crois, que le travail de chacun est reconnu comme une valeur en soi, par chacun. Or, avec un Hellweg comme avec un Meyer, la paix du travail n'est ni plus ni moins qu'un outil d'interdiction des grèves. Quant aux CCT, ce sont de longs papiers, difficiles à lire, et tellement ennuyeux...

La réponse des travailleurs à ce mépris est la grève. Faudra-t-il encore beaucoup de grèves pour restaurer un partenariat social viable? Ou cette fois-ci nos autorités, propriétaires des CFF, vont-elles faire prévaloir le bien-être des citoyens sur les délires stratéchiques de quelques excités?

"Giù le mani dalle officine!"
"Bas les pattes des ateliers!"



Et la Boillat?

Avant de reparler de la Boillat, Karl doit encore travailler un peu ses informations. Il faut dire, aussi, que Martinou sait se couvrir de ridicule sans qu'on l'aide! Rachat d'une entreprise en faillite, pseudo-nouveautés, tout y passe! Et, c'est un fait, la Boillat aussi y passe...


Retour à Bellinzone (10.04.2008)

Les Boillat avaient obtenu une médiation, on s'en souvient. Jose
ph Deiss, qui voulait juste laisser cette affaire loin de son bureau, n'avait pas trouvé mieux. Et Rolf Bloch, dont la récente interview -Karl se demande toujours si ce n'est pas un poisson d'avril- laisse croire que ce fut un succès, avait logiquement échoué. Faire en sorte que les agneaux et le boucher fassent ami-ami autour d'une machine à saucisses, ça ne marche pas. Les membres de la délégation Boillat l'avaient souvent répété: à la médiation, on qualifiait les informations de la partie adverse de fausses, et les choses en restaient là. Personne ne pouvait définir le vrai, puisque ce n'est pas là la tâche du médiateur, et l'expert, Jürg Müller, n'a jamais pu imposer une délimitation entre les fabulations de Martin Hellweg et les résultats de son travail.

A Bellinzone, les travailleurs ont donc obtenu autre chose: un arbitrage. Nicolas Wuillemin, et les Boillat avec lui, l'avait souvent demandé à Rolf Bloch, sans succès. La solution résidait dans l'arbitrage. Les conditions politiques n'étaient pas les mêmes, et il valait mieux pour les autorités laisser le conflit s'engluer dans une médiation plutôt que de désavouer Martin Hellweg et Swissmem.

Un arbitrage, c'est la possibilité de distinguer entre le vrai et le faux, et de faire prévaloir le vrai. Si la direction de CFF Cargo s'est trompée, quelqu'un le lui dira, et les plan seront revus en fonction de cette erreur. Si les travailleurs doivent revoir leur copie et acce
pter certains sacrifices, cela leur sera expliqué et démontré. Ce n'est pas grand chose, pourrait-on croire... Mais il semble que par les temps qui courent, donner tort à un top manager est plus grave que de licencier sur un coup de tête des centaines de personnes. Bien sûr, il ne faut pas espérer une parfaite impartialité, mais justice, au moins un peu, il y aura. Enfin!

A Bellinzone, on peut donc fêter la victoire, car c'est bien une grande et belle victoire. A mon avis, sans trahir l'esprit des grévistes des deux régions, on peut considérer que les Boillat peuvent dire qu'ils y ont pris part. Peut-être n'ont-ils pas sauvé leur usine, mais ils ouvert un chemin, et à quel prix! Cette victoire, comme nous aurions voulu la fêter aussi à la Boillat, et combien l'aurions-nous méritée... C'est dur à dire, mais les choses sont ainsi faites que la joie de nos amis tessinois ne cicatrise pas les plaies ouvertes à Reconvilier. Pourtant, il ne faut pas en rester là: la grève de Bellinzone a montré que ce qu'on fait les Boillat n'a pas été vain, et que d'une étincelle est née la flamme d'une juste révolte. Et parfois, les révoltés l'emportent!

Ainsi, ne manquez pas la fête de ce samedi, aux officine de Bellinzone. Assurément, comme l'a dit Michela dans les commentaires, nous y sommes les bienvenus. Il est temps, pour ceux qui se battent avec tant de courage pour leur outil de travail, de fêter un peu!


Karl souhaite une longue vie aux officine et une longue vie à leurs travailleurs! Puissent-ils réparer encore des milliers de locomotives. En les regardant rouler, je penserai à eux.

Photo par Michi B., Officine CFF, Bellinzone, 5 avril 2008.

vendredi, mars 28, 2008

L'heure tourne

Karl ne travaille pas assez, il le sait, et sinon on le lui fait savoir. Sur ce coup, il a même un train de retard, puisqu'il n'a nullement commenté la grève de CFF-Cargo, qui aurait pourtant mérité un petit détour. Quand à la vie de ce qui fut la Boillat et d'une entreprise à l'agonie nommée Swissmetal, il y a long à dire. Et Karl le dira!

Pour le moment, toutefois, il cède la parole aux Femmes en colère, qu'il rejoint dans leurs propos:

Il y a à Reconvilier une tradition... Les sociétés locales, pour remplir leur cagnotte, vendent de la soupe aux pois. Les habitants arrivent avec leur boîte en plastique et repartent déguster leur soupe à leur domicile.

Parce que le soutien populaire pour les grévistes de la Boillat fût magnifique. Parce qu’un peu partout dans notre pays des élans de solidarité s’étaient manifestés. Parce que nous connaissons toute l’angoisse et les difficultés que l’on rencontre en période de grève.

Les Femmes en Colère organisent la vente d'une soupe au pois ce samedi 29 mars dès 11h30 à côté du magasin de fleurs. Et cela au profit des grévistes de CFF-Cargo.

Alors à vos boîtes en plastique pour soutenir les grévistes de Bellinzone! Possibilité aussi de se restaurer sur place !

Pour la solidarité, merci de diffuser largement ce message à vos contacts.

samedi, janvier 26, 2008

2 ans déjà...

Il y a 2 ans, la Boillat se mettait en grève.

Depuis, il s'en est passé, des choses, sur notre Terre. Des choses à vous faire désespérer de tout, surtout de l'homme. Un climat qui se réchauffe. Untel qui décide qu'envahir un pays serait une grande idée. Un autre qui place des bombes par-ci par-là. Quelques crimes horribles. Un monde de la finance qui croit que la planète est un grand casino. Tout près de nous, des conflits entre patrons et syndicats dans lesquels la volonté de briser toute résistance l'emporte sur l'idée de partenariat social. De grands procès à vous faire douter de la justice, si même ils ont lieu.

Oh, ce n'est pas depuis hier que l'on doute de la justice, comme en témoigne un vieux fragment de papyrus qui, en 2500 ans, n'a pas pris une ride:
"Or, à vrai dire, si, à ceux qui adoptent ces attitudes héroïques, la loi apportait quelque secours, et si, à ceux qui ne les adoptent pas mais s'y opposent, elle infligeait une sanction, l'obéissance aux lois ne serait pas sans intérêt; mais en réalité, il est manifeste que le droit n'est pas capable de venir en aide à ceux qui font ces sacrifices."
Même si ce passage est un peu cité hors contexte, Antiphon, l'auteur, a su trouver les mots: comment ne pas penser aux Boillat quand on le lit? Toutefois, on peut bien dire tout ce qu'on veut sur le manque de justice et tous les maux du monde, il est des choses humaines qui, par leur force, dépassent tout cela. A croire que si l'homme n'était pas capable du pire, il ne nous donnerait pas le meilleur.

La grève des Boillat représente peut-être ce que les gens peuvent donner de meilleur. Comme quoi, on se passerait certainement bien du meilleur pour aller aux champignons, profiter du soleil et boire un coup avec les amis. Mais voilà, la bassesse ayant empoisonné Swissmetal, il fallait de la grandeur pour y remédier.

La grandeur, ça ne nourrit pas. Mais, c'est un peu comme le soleil: ça accompagne toute la vie. Quelle que soit la situation, j'ai toujours, quelque part, un peu de soleil avec moi, celui des Boillat. Et j'espère que vous aussi.

Il y a 2 ans, la Boillat se mettait en grève. On s'en souvient comme si c'était hier.

mardi, octobre 02, 2007

La Boillat, toujours là!

Version 3:
-les ajouts sont indiqués en rouge dans les sous-titres et dans le texte. Merci!
-Swissmetal reparle déjà des Calotiles! Autant de bêtise, c'est très fort. Rendez-Vous en fin d'"édito"!

Karl se fait vieux, que voulez-vous... Il vous avait promis de compléter l'"édito" précédent, puis finalement... non. Alors, à force de nouvelles qui s'accumulent, il en fait un nouveau. Il ne faut pas lui en vouloir, c'est l'âge, car il semble que le voilà qui s'approche tranquillement de la retraite. Ah, la quille! En effet, si Karl a été créé pour soutenir les Boillat dans leur lutte contre la direction de Swissmetal, il faut bien convenir que Swissmetal risque bientôt d'être de l'histoire ancienne. Mais, promis, même retraité, Karl restera là pour la suite car, que la Boillat ait un avenir, il y croit toujours. "L'espoir, c'est ce qui meurt en dernier", disait un jour Renzo Ambrosetti avec dépit. Karl a envie de lui répondre: "L'espoir ne meurt jamais".


Martinou cherche un petit job

Ons e souvient de cet article de Cash, journal gratuit publié en Suisse alémanique (interview vidéo ici, merci JB!). Martinou y exprime, d'une manière qui reflète la profondeur de ses études de marché, que "l'Inde a le vent en poupe" [Indien hat die Nase vorn]. Donc, pour cette raison très fondamentale, il faut investir en Inde. Comme personne n'a voulu perdre son entreprise dans les bras de Swissmetal, Martin Hellweg assure même qu'il va y fonder une entreprise. SanA a déjà proposé le nom de baptême de cette usine, et ce sera "l'Arlésienne". En attendant que la nouvelle presse de Dornach fonctionne, j'attends donc avec impatience les images du premier coup de pioche. Car, pour piocher, ça pioche, chez Swissmetal.

Avant 5 ans, Martinou ne pense d'ailleurs pas que Swissmetal sera à nouveau durablement sur les rails. Autrement dit, il prévoit de restructurer encore 5 ans, ce qui nous fera environ 10 ans de restructuration au total. Pour un spécialiste du domaine, Martinou se hâte lentement. Très. Malgré cela, il regarde déjà plus loin que cette échéance car, comme tous les grands hommes de ce monde, sa vue porte loin. Très. Ainsi, il pense déjà à l'après Swissmetal, et avoue que, malgré son énergie et sa passion à semer la destruction, il sera un peu fatigué, et aimerait prendre une année sabbatique. Malgré cela, il laisse entendre qu'il aura plaisir à relever de nouveaux défis et, même s'il admire beaucoup des gens comme ceux qui dirigent Nestlé, lui-même se sent plutôt fait pour gérer des situations de crise. En langage décodé, des situations où l'employeur panique et n'est pas trop regardant à la marchandise. Toujours en langage décodé, malgré les dénégations de Swissmetal, Martinou laisse entendre que des propositions d'embauche ne partiraient pas directement dans sa corbeille. Donc, si vous cherchez quelqu'un pour vider votre fosse septique, n'hésitez pas!

Ceci dit, Cash n'a pas répondu à mon email à ce propos.


La SWX n'est pas contente

En tout cas jusque là, Martin Hellweg a largement accumulé de quoi rembourrer son oreiller. Tout un tas de billets de banque qu'apparemment, il ne juge pas bon de rendre publique. Distrait comme il est, il a dû oublier qu'il faisait partie du conseil d'administration de Swissmetal et que, par conséquent, sa rémunération devait être publiée. La SWX, néanmoins, dans son communiqué, n'indique pas s'il s'agit bien de Martinou. Mais Swissmetal se fait tout de même taper sur les doigts.


Licenciements

A côté de ça, Swissmetal licencie. Comme annoncé dans ce communiqué, les licenciements porteront cette fois sur 146 emplois à plein temps d'ici la fin de l'année. Et l'aberration que représentent de tels licenciements est assez insondable.

Revenons en arrière: en août, il fallait produire, à la Boillat, 40 tonnes par jour (au lieu de 60 tonnes, dont un grosse part de petits diamètres, quand la Boillat était une usine viable, avec un tiers de personnel en plus environ). Cette quantité de 40 tonnes nécessitait deux choses. Premièrement, comme il reste peu de monde à la Boillat, la production fut essentiellement axée sur de gros diamètres (pour la Boillat), soit les diamètres sur lesquels le moins d'opérations sont requises et, par conséquent, sur lesquels la valeur ajoutée est la plus faible. Secondement, il fallait mettre un maximum de monde sur des machines et donc, par exemple, déplacer des gens de la maintenance à la production. Encore un peu, et ils mettaient le personnel de la vente, où plutôt ce qui en reste, sur des machines. C'est là, typiquement, la méthode Busch-Jaeger, où seule la quantité compte, et où peu importent les bénéfices... En septembre, néanmoins, ce tonnage a été diminué légèrement, pour pouvoir, probablement, produire aussi de plus faibles diamètres.

Et voilà que Swissmetal annonce qu'en gros, plus de 70 emplois seront biffés à Reconvilier (et le reste à Dornach, dans une logique complètement absurde de 50/50). Comme chacun peut se le figurer, pour qu'une fonderie soit rentable, il faut un certain taux d'utilisation des installations. Car, ces installations, il faut les alimenter, les entretenir, les réparer, etc. Or, déjà maintenant, ce taux, la Boillat a de fortes chances d'être en-dessous. Qui plus est, si l'objectif reste à peu près constant, comment continuer à l'atteindre avec un tiers de personnel en moins?

On pourrait dire que la nouvelle presse de Dornach cause la fermeture de celles de Reconvilier et que, par conséquent, il y a du monde en trop. Mais ça ne fera jamais 70 personnes à licencier à Reconvilier. Aussi, il faut trouver une autre explication. Celle qui semble tomber sous le sens, c'est que Swissmetal cherche à économiser sur les salaires. Mais, une telle économie, dans le cas présent, nuit clairement à la rentabilité de l'entreprise. Autrement dit, l'économie réalisée avec ces licenciements risque de se transformer en coûts supplémentaires dès le mois suivant. Vu les délais de consultation annoncés par Swissmetal dans le communiqué, lesdits licenciements devraient avoir lieu fin novembre. D'ici là, ce sera le petit jeu des sadiques de service, qui terroriseront les Boillat pour les faire produire plus. Et dès décembre, donc, les économies sur la masse salariale se transformeront en frais d'échelle supplémentaires et en baisses de production.
Comment expliquer un tel enchaînement? Karl se hasarde ici à une explication très hypothétique... Il semble que c'est la banque qui paie les pots cassés qui a exigé le nantissement du métal en cours de transformation (soit plusieurs millions de francs de garantie, à mettre en rapport avec les dizaines de millions de francs de dettes du groupe). De telles mesures, de la part d'une banque, sont peu courantes. Se pourrait-il que cette même banque exige maintenant des licenciements, pour éviter que sa ligne de crédit serve à payer des salaires? Si c'est le cas, Swissmetal ne devrait pas passer l'hiver. Mais, répétons-le, c'est là une pure hypothèse.

Cependant, quand Swissmetal annonce la fermeture de la fonderie de la Boillat, et le démantèlement des presses, ceci pour la je-ne-sais-même-plus-combien-tième-fois, c'est dur à croire. Et, justement, à cause du fait qu eSwissmetal ne peut pas dépenser d'argent pour ça. Le bruit court que la presse Loewy devrait être démontée et expédiée en Chine (l'Inde, la Chine, toujours elles) avant la fin de l'année.

Juste devant la Loewy, à l'usine 1, il y a une plaque métallique. Sur elle sont inscrite les données techniques principales de la machine: sa poussée, son volume, son poids, etc. Karl a oublié les chiffres, mais c'est un gros volume, et un gros poids. Démonter cette presse, ce sera très cher. Pas sûr qu'une banque ait envie de dépenser de l'argent pour assouvir les désirs d'apocalypse de Martinou et Volklore.

Mais ce tableau ubuesque est le même que les prévisions pour les usines 1 et 2 de la Boillat. D'abord, c'était la 1 et la 2 qu'on devait conserver. Après, le train entre les 2 usines, ça coûtait trop cher, et il fallait faire les transports en camion (encore plus chers, donc!). Ensuite, pour faire moins cher, il fallait mettre la 1 dans la 2 (impossible, à cause de la step et des bains de décapage). Maintenant, c'est la 2 qu'il faut mettre dans la 1. Alors, de 2 choses l'une: soit ça déraille plein tube (pour trains d'aterrissage), soit... euh... Soit ça délire plein pot (de fleur en laiton d'architecture).

Tiens, à propos de licenciements, Karl a failli oublier une dernière chose. Oublier cela, c'est bien ce que Swissmetal veut, puisque le groupe ne communique pas dessus. Annoncer des licenciements à Reconvilier ou à Dornach, soit, ça fera peut-être remonter l'action. Mais annoncer des licenciement du côté de la soi-disant Rolls Royce de Lüdenscheid, j'ai nommé Busch-Jaeger, c'est un peu plus douloureux. Or, chez Busch-Jaeger, il se trouve qu eSwissmetal licencie aussi. 35 personnes au dernière nouvelles. On nous disait que l'équipe de management de cette usine avait "fait ses preuves". Je ne suis pas sûr que Swissmetal voulait parler des preuves de sa nullité, mais c'est chose faite.


Et le plan social?

Au sujet du plan social, quelque chose coince aussi. On peut légitimement penser qu'il est bien maigre mais, en Suisse, c'est dans la moyenne. Soit. Cependant, dans le plan signé par les partenaires sociaux, les moyens de financements ne figurent pas. Normal, aurait-on envie de croire, puisque c'est l'entreprise qui paie. C'est, comme la suite l'a montré, sans compter sur l'intarissable mesquinerie de Swissmetal. En effet, la source d'argent frais pour payer le plan social, ce devrait être la fondation patronale de la Boillat. Mais, comme je disais, ça coince: il semble en effet, ô surprise!, que la fondation patronale de la Boillat doive servir exclusivement aux Boillat, pour autre chose qu'un plan social, et pas du tout aux travailleurs de Dornach. Donc, à part en jouant la politique du fait accompli -ce qui ne serait pas surprenant- Swissmetal paiera au moins une partie de sa poche (trouée).


Pétition

La pétition lancée par nos amis Genevois poursuit sa route. Après avoir été renvoyée, pour d'obscures raison, devant le Conseil d'Etat genevois -ce qui en soit était un succès-, le canton de Vaud s'est enfin prononcé dessus. Et, tenez-vous bien, elle a passé la rampe: par 56 voix contre 55 (!), la pétition a été renvoyée devant le Conseil d'Etat vaudois, qui devra statuer dessus. En soit, c'est aussi une petite victoire, qui montre que cette grève a remué bien des sensibilité et suscité la réflexion. Il semble que ce succès soit dû, en plus du travail des courageux pétionnaires, aux interventions marquantes des députés Michèle Gay-Vallotton (PS) et Jean-Michel Dolivo (SolidaritéS).


On réécrit en douce

"Un voisin", au regard affuté duquel rien, décidément, n'échappe, nous a trouvé un joli scoop. Swissmetal ne serait plus leader!

En effet, jusqu'au communiqué du 23 juillet 2007, on pouvait lire à chaque fois, en pied de page:

"Swissmetal est le leader mondial technologique dans la fabrication de produits à haute valeur ajoutée à base de cuivre ou d’alliages cuivreux, principalement destinés aux secteurs industriels de l’électronique, des télécommunications, de l’aéronautique, de l’automobile, de la bureautique et de l’horlogerie. Au cours de l’exercice 2006, la société a réalisé un chiffre d’affaires de presque CHF 358 mio. À fin juin 2007, le groupe comptait 812 employés à temps plein. Swissmetal est coté à la SWX Swiss Exchange. Avec des sites de développement et de production à Reconvilier (CH), Dornach (CH) et Lüdenscheid (D), de propres bureaux de vente en Italie, en Allemagne et aux États-Unis, ainsi qu’un réseau mondial d'agents et de revendeurs, Swissmetal fournit des clients en particulier en Europe, en Amérique du Nord et en Asie."
C'était la belle époque où tout allait si bien! Les bureaux du groupe, en Italie, étaient "propres", tout comme ceux d'Allemagne et des USA! Il y avait "un réseau mondial d'agents" (secrets) et surtout, Swissmetal produisait à "haute valeur ajoutée" dans les domaines "de l’électronique, des télécommunications, de l’aéronautique, de l’automobile, de la bureautique et de l’horlogerie". Rien que ça!

Par la suite, histoire de ne pas se faire accuser de diffusion de fausses informations, Swissmetal à remplacé ce texte par ceci (voir le communiqué du 3 août 2007):

"Swissmetal fabrique et commercialise à l'échelle mondiale des produits à haute valeur ajoutée à base de cuivre ou d’alliages cuivreux, principalement destinés aux secteurs industriels de l’électronique, des télécommunications, de l’aéronautique, du pétrole, de l’automobile, de la bureautique, de l’horlogerie et au secteur de l'architecture. Au cours de l’exercice 2006, la société a réalisé un chiffre d’affaires de CHF 357,6 mio. À fin juin 2007, le groupe comptait 812 employés à temps plein. Swissmetal, dont le siège est à Dornach (Suisse), est coté à la SWX Swiss Exchange sous le nom UMS Usines Métallurgiques Suisses Holding SA."
A ce moment, Swissmetal a donc fait le deuil de toutes ses positions de leader. Positions que, parmi les usines du groupe, seule la Boillat occupait. Terminé donc, le leadership! Alors que, le leadership, rappelons-le, était un objectif central de la fameuse "stratégie". Enfin, la "stratégie", Karl s'y perd: à force de changements de cap, ça donne le mal de mer. Finis aussi les bureaux propres et les agents qui sont partout. Bienvenue à l'architecture, un domaine où la production a une valeur ajoutée misérable (enfin, les calotiles rattraperont ça!). Toutefois, peut-être à cause de la SWX, le contenu est plus précis. L'abréviation UMS figure enfin, ainsi que le chiffre d'affaires exact.

Mais ce n'est pas tout! Dans la dernière mouture en date, celle du 24 août, soit 2 communiqués plus loin, voici ce qui a changé:

"Swissmetal produit et distribue à l'échelle mondiale des produits spécifiques haut de gamme à base de cuivre et d'alliages cuivreux [...]"
Les produits ne sont plus "à haute valeur ajoutée" mais "haut de gamme". Autrement dit, c'est du bon matériel sous tous rapport (du moins, ce que les clients ne renvoient pas), mais ça ne rapporte rien. Que d'honnêteté de la part de Swissmetal! Martinou a-t-il eu un éclair de lucidité? Cet éclair a-t-il été causé par un coup de fouet donné par monsieur SWX? Nous ne le saurons jamais mais, une chose est sûr, avouer ça a dû faire grincer quelques dents de "managers au curriculum international" (oui, ils se nomment ainsi eux-mêmes).


On réécrit encore

Ce genre de réécritures de l'histoire, parfois, ça ne passe pas. C'est le cas du mémorandum (une nouvelle marque de papier toilette) publié par Swissmetal pour se justifier. André Willemin, ex-directeur de la Boillat licencié par Martinou parce qu'il osait penser, n'a pas laissé passer ça. Du moins, pour ce qui le concernait. Ce dernier à donc fait parvenir à la presse, le premier octobre 2007, une lettre dans laquelle il rétablit la vérité. Le Journal du Jura ainsi que le Quotidien Jurassien en ont parlé. Et vous pouvez lire cette lettre intégralement ici. Juste comme ça, pour le plaisir du beau jeu de mots, voici le titre: "Swissmetal, leader en contrevérités". Eh oui, ce leadership là, ils ne sont pas prêts de le lâcher!


Du côté de la Coordination

La salve contre Swissmetal a repris dès le 2 octobre. Cette fois-ci, ce fut autour de la Coordination "Solidarité Boillat" [CSB] de se lancer, lors d'une conférence de presse. A cette occasion, les intervenants ont tenté de montrer à quel point la communication de Swissmetal est malhonnête et biaisée. De ce fait, ils ont aussi cherché à montrer quelle est la situation du groupe. Le tableau qui en résulte, comme celui que je dresse ici, est catastrophique. Cette conférence a été reprise dans le communiqué que voici. Philippe Oudot, dans le Journal du Jura, a bien sûr pris la peine d'offrir un compte-rendu plus complet.

Karl avait mentionné ici une surprise à venir, préparée par la CSB. Voici leur dernier communiqué, qui nous convie à une petite manifestation du côté de Dornach. Le but est de faire une petite collecte, pour que Swissmetal puisse acheter un peu de matière première. C'est ironique, bien sûr, mais par contre, c'est sérieux: cette manifestation aura bien lieu, jeudi 4 octobre 2007, à 14 heures, devant l'entrée de l'usine de Dornach.


Dans Le Temps

Quoi qu'on pense du défaitisme de Serge Jubin, on ne peut pas lui reprocher de ne pas mener un suivi sur le long-terme, en ce qui concerne la Boillat. Certes non: 3 articles en 2 semaines dans lesquels, même si le sujet ne touche pas directement la Boillat, le journaliste semble s'y sentir ramené tout naturellement. Tant mieux, parce que la Boillat le mérite. D'abord, Serge Jubin publie un article sur le travail des élus locaux (25.09.07). Ensuite, il ajoute un petit article, qui va avec le premier, sur l'ambivalence de Reconvilier, étiré le long des 2 usines Boillat (25.09.07). Et enfin, le plus intéressant, un article sur l'intérêt qu'ont les Boillat encore employés par Swissmetal pour la politique (2.10.07). Beaucoup de désillusion, malheureusement. Mais aussi cette lucidité, qui, toujours, me frappe.


Tiens, des blogs...

Oui, des blogs, mais en Birmanie. Il est amusant de constater que nombre d'entre eux, comme celui-ci, sont ouverts chez Blogger (donc en www.*.blogspot.com). Comme quoi, Blogger garantit certainement bien l'anonymat, n'est-ce pas Martinou? Pas assez, toutefois, pour une dictature aussi militarisée que celle du Myanmar. Il est aussi ironique de voir que la junte militaire Birmane a rapidement eu l'idée de couper le pays d'Internet. La comparaison s'arrête là, les Birmans n'ayant pas -comme les Boillat l'ont eue en son temps- de banque cantonale qui offre un accès Internet gratuit à côté. Néanmoins, un dictateur reste un dictateur et, heureusement pour nous qu'ici, celui qu'on connait ne peut pas tirer dans la foule.


Calotiles, le retour!

Karl ne résiste pas à l'idée de faire quelques heures supplémentaires pour vous faire partager un moment de franche rigolade. Swissmetal a donc, déjà, ressorti les calotiles de ses plans "stratégiques"! Le fait que ce soit juste après la conférence de presse de la CSB, qui répandait de très vilains bruits sur le groupe, relève bien sûr du plus pur hasard. Non, n'y voyez pas une sorte de contrefeu.

Les Calotiles, Karl vous en parlait dans le dernier "édito", avec un petit canular. Souvenons-nous, le Martinou de circonstances racontait:

"Conscients des problèmes climatiques et toujours à la recherche de nouvelles sources d’énergie thermique, Swissmetal a donc l’honneur de vous présenter une tuile à chaleur. Et quelle tuile! Faite en matière rare, le cuivre, alors qu’on pourrait bêtement la faire en terre cuite, nous sommes assurés d’en écouler en quantité. Notre offre, à l’image de celle des lunettes pour WC en laiton massif, répond, c’est limpide, à un besoin pressant, pour ne pas dire urgent."

Le pire, dans tout ça, c'est tout de même que le véritable communiqué de Swissmetal, du 3 octobre, est à peine différent:
"Swissmetal procède ces jours-ci à un essai sur le terrain avec un nouveau produit qu’il a développé dans le domaine architectural et plus particulièrement de la technique des bâtiments. Le produit est monté sur le toit d’un bâtiment et fait partie d’un système permettant de produire de l’énergie écologique en captant la chaleur du milieu environnant. Il se base sur la très longue expérience de Swissmetal dans le domaine des bronzes de construction et sa première version est constituée de l’alliage Dorna A de Swissmetal."
Après avoir lu ça, on peut légitimement croire tout connaître de la bêtise humaine. Mais Karl a néanmoins voulu s'assurer de l'absence de sérieux du projet, et a téléphoné à une personne spécialisée sur les questions de développement durable, à qui il a lu ce communiqué. La lecture s'est achevé sur un rire assez désemparé: était-ce donc possible, ça? La personne a ensuite répondu que, pour la norme de construction Minergie, c'était assez comique: Minergie favorise l'usage de matériaux locaux (le cuivre et les autres métaux venant généralement d'autres continents) et courants (or, les métaux sont rares). De plus, le bilan énergétique de tuiles en alliages cuivreux (extraction, raffinage, transport, fonte, etc.), comparé à celui d'une tuile en terre cuite, est sans doute faramineux... Enfin, mon correspondant se demanda comment un pareil machin pourra chauffer une maison quand il fait froid, c'est-à-dire quand il n'y a pas de soleil, ou de la neige sur le toit. Ceci sans même aborder les questions de conductivité thermique (les métaux conduisent aussi très bien le froid...) et d'isolation pour quand il fait trop chaud. Il m'a finalement fait remarquer que ce type de produits était usuellement développé en collaboration avec des entreprises spécialisées ou des hautes écoles, pour intégrer le projet à une vision d'ensemble. Apparemment, ici, une telle collaboration n'existe pas.

A voir la suite du communiqué, où il est écrit que "En raison de l’innovativité du produit et du stade de développement actuel, Swissmetal n’est cependant pas encore en mesure d’estimer le potentiel de ce produit", Swissmetal aura fait faillite avant d'avoir vendu la première tuile. Bref, c'est là la nouvelle mouture des tubes pour train d'atterrissage et autres commandes dans l'industrie pétrolière. Du vent, à une différence près: cette fois-ci, nous pouvons le garantir, Swissmetal est techniquement en mesure de produire cette chose, en plus de produire des mots atroces, comme "innovatif".

La calotile est donc essentiellement conçue pour trôner entre le décapsuleur qui fait Pschit à haut-parleur intégré, le coupe-oeuf électrique à embrayage et le thermomètre souvenir en forme de Tour Eiffel. Oui, la calotile entre dans la catégorie merveilleuse de ces objets inutiles qu'un aveuglement, causé par un moment d'optimisme intense ou par l'extase des vacances, nous aura fait acheter. On garde de telles choses, non pas pour leur valeur -sinon on paierait pour les liquider-, mais pour les moments qu'elles nous ramènent en mémoire ou, éventuellement, pour se donner l'impression que, non, on ne s'est pas fait escroquer.

Tiens, à propos, l'alliage employé pour produire ces tuiles sera le Dorna A. Le A, ne serait-ce pas pour "Arnaque"? Le Dornarnaque... Enfin un joli mot inventé par Swissmetal! D'ailleurs, toujours en parlant de mots, Calotile, bien que Swissmetal ait déposé la marque, n'est pas employé dans le communiqué. Il semble que Martinou n'a pas envie que, via Google ou via http://www.calotile.com/, ses clients viennent faire un tour par ici. A quand un nouveau nom?

Pour toutes ces belles raisons, Karl s'offrira une, et une seule, calotile, lorsque ce produit sera commercialisé. S'il le peut, du moins. Presse-livres ou chausse-pieds, peu importe l'usage. Karl, tout simplement, a envie de conserver chez lui un immortel trophée de l'infinie bêtise swissmétalienne. Et il gravera dessus "Swissmetal, saison de chasse 2006-2008".